Matthieu (27 Octobre 1987 - 25 Décembre 2005)

En ce jour de l’enterrement de Matthieu auquel nous avons tous songé avec terreur sans jamais oser lui demander s’il y pensait parfois, nous voudrions rappeler le courage plus qu’exemplaire avec lequel il a toujours affronté une maladie dont il ne s’est jamais plaint d’être atteint plutôt qu’un autre et qu’il ne nous a jamais reproché de ne pas comprendre ; une maladie dont il a jusqu’à la fin supporté toutes les douleurs – la confrontation aux aberrations incessantes d’un système rigide aux certitudes validées, l’épuisement et l’isolement, une somme de souffrances physiques et mentales dont nous ne pouvons pas avoir idée et sur laquelle nous avons souvent fermé les yeux.

Nous voudrions remercier ceux qui par l’observation, la raison et des soins attentifs ont tenté de le guérir et de le soulager.

Nous voudrions remercier profondément tous ceux qui, plutôt que de reculer devant le spectacle d’une vie qui risquait de finir trop tôt, l’ont aimé de tous leur cœur et qui, par leur amour et leur présence, ont toujours tenté d’affirmer la primauté et la richesse inépuisable de la vie ; tous ceux ont refusé de considérer la maladie comme une parenthèse en-dehors du cours normal de la vie, tous ceux qui ont toujours cherché à créer et à échanger.

Nous voudrions remercier tous ceux qui, plutôt que de souffrir à l’idée de tout ce qu’ils ne vivront pas avec lui, à la pensée de leur vie sans la sienne, au sentiment terrible qu’engendre le fait de savoir que Matthieu n’accompagnera pas leur vieillesse, ne participera pas à leurs peines et à leurs joies futures, préfèrent aujourd’hui penser à tout le bonheur qu’il a bien voulu nous donner, à tous les échanges qui composent un passé à jamais inépuisable et qui se souviendront toujours de la leçon de grandeur et d’humanité qu’il nous a donnée, par son courage et la façon dont il a pardonné toutes nos lachetés.

Nous voudrions remercier tous ceux qui ont refusé de parler à sa place et qui l’ont aimé par tous les moyens, en sachant qu’il n’est jamais trop tard pour cela et qu’une vie ne vaut pas plus qu’une autre pour durer davantage. A nous qui nous réjouissons d’être encore en vie aujourd’hui, sa lutte et sa mort sont venues douloureusement rappeler qu’au delà de nos deux ou trois principes préconçus sur ce qui serait une vie accomplie, il n’y a pas d’autre norme que le courage et l’amour en matière d’humanité.

Le 28 Décembre 2005